la grande majorité des gestionnaires de portefeuille ne battent pas les
indices et donc une approche qui favorise la simple détention des indices fait beaucoup de sens pour
ceux qui ne savent pas comment choisir des compagnies supérieures ni des gestionnaires capables de
créer de la valeur ajoutée. Évidemment, je m’en voudrais de ne pas souligner que comme notre mission
première est de faire mieux que les indices – et nous y sommes arrivés depuis 1993 – nous sommes
donc du camp qui prône une sélection active (et assidue) de titres boursiers.
Le problème de la gestion passive est qu’elle ne l’est pas vraiment pour la grande majorité de ses
adeptes. D’abord, plusieurs investisseurs jouent les girouettes avec la Bourse : ils achètent après les
bonnes années et vendent après les mauvaises. La gestion indicielle ne règlera rien pour ces
boursicoteurs à temps partiel. En second lieu, même ceux qui sont présents en Bourse ont tendance à
changer de style, de types de fonds indiciels ou de gestionnaires selon la mode du jour. En gros, ils
vendent les fonds qui ont sous-performé à court-terme pour favoriser ceux qui ont bien fait récemment.
De la même façon, lorsque la gestion passive a bien fait relativement à la gestion active pendant
quelques années, les investisseurs ont tendance à favoriser la première. Et le seul acte de sortir de la
gestion active pour favoriser la gestion passive – lorsque réalisé à grande échelle – continue
d’alimenter la divergence entre les deux approches. Les grands titres des indices, plus en demande,
continuent d’augmenter en Bourse et font encore plus mal paraître la gestion active.
Pour illustrer combien la gestion passive ne l’est qu’en théorie, le meilleur paramètre est le taux de
rotation moyen des fonds négociés en Bourse (FNB): il est de 880% par année1
. En d’autres mots,
l’investisseur "passif" moyen conserve son FNB environ 47 jours! Et c’est encore bien pire avec le
fonds indiciel SPY (lié au S&P 500) : la durée de détention moyenne est d’environ 12 jours soit un
taux de rotation annuel qui avoisine les 3000%. Cela se compare à un taux de rotation moyen de 120%
pour les actions en général. Juste pour vous donner un ordre de grandeur comparatif, le taux de rotation
de notre portefeuille modèle est autour de 14% en moyenne. Ce qui veut dire, qu’à Giverny Capital,
nous conservons nos titres, en moyenne, pendant environ 2500 jours!
1 Source: Financial Times: Jack Bogle: the lessons we must take from ETFs (édition du 11 décembre 2016)
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Qui dit haut taux de rotation dit rendements plus faibles (le deuxième principe de la thermodynamique
appliqué en Bourse). Par exemple, dans la dernière décennie, le fonds indiciel SPY a réalisé un
rendement annuel de 6,9%. Par contre, les détenteurs de ce fonds, dans l’ensemble, n’ont réalisé qu’un
rendement annuel de 3,5%2
. La moitié du rendement s’est littéralement "évaporée" dans les activités
de transactions.
Bien entendu, toujours à l’affut de ce qui est populaire (et source de revenus d’émission et de
transaction), Wall Street a bien profité de la manne passive : il existe aujourd’hui plus de 6000
différents ETF (Exchange Traded Funds) comparé à 1000 il y a dix ans. La grande quantité de choix
et la facilité de transaction inhérente aux ETF rendent leurs possesseurs encore plus irrationnels.
En résumé, que ce soit des "robots" ou des fonds passifs, le problème n’est donc pas le produit
financier : c’est le comportement autodestructeur des investisseurs. Par leur impatience et leur
comportement de girouette, les investisseurs sont bien souvent, paradoxalement, à la source de leur
propre sous-performance.
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